Diplômée architecte de l'INSA Strasbourg en 2010, Anne-Laure Baudin manie l'espace et la matière d'une autre manière : par la scénographie, qu'elle exerce depuis 2012, et à son compte depuis 2016. D'expositions en décors de théâtre, elle s'épanouit dans le travail aussi bien intellectuel que manuel.
Propos recueillis par Stéphanie Robert
Vous êtes scénographe-décoratrice. Pouvez-vous nous présenter votre métier ?
Je travaille pour des compagnies de théâtre ou de cirque, des festivals, des expositions, des scènes de spectacle. Parfois, je conçois les décors, parfois je fabrique, et parfois les deux. Chaque projet est différent. Je travaille le bois, le métal, le textile, la peinture, la résine… Ça me plaît de toucher à tout. À tout, sauf la mécanique et la lumière mais je ne désespère pas d’apprendre !
Pour tout ce qui relève de la scène et des événements urbains, je suis intermittente du spectacle. Parallèlement, j’ai une microentreprise, pour les expositions et des prestations en architecture, pour des agences ou des particuliers.
Comment en êtes-vous venue à la scénographie ?
En 2012, j’ai commencé à créer des décors pour une compagnie de théâtre que je connaissais. Je me suis rendue compte que ça me plaisait beaucoup et que je bricolais bien. Mais pour en faire mon métier, il me fallait une certification, une formation technique, j’ai donc repris mes études et obtenu mon CAP charpente en 2014.
En architecture, je me sentais dépassée par l’ampleur et la durée des projets. La responsabilité de l’architecte est lourde à porter. La scénographie me correspond mieux, car elle a plus de légèreté et de fantaisie. Mais je tiens à garder un pied dans l’architecture, pour son côté nécessaire et concret.
Vous aimez explorer la matière, la créativité… Qu’est-ce qui vous plaît dans votre métier ?
Ce que j’aime vraiment, c’est de pouvoir à la fois concevoir et fabriquer ce que je conçois. C’est vraiment le plaisir de pouvoir partager mon temps entre le bureau et l’atelier. J’aime aussi beaucoup la richesse et la diversité des projets. C’est à chaque fois de nouvelles rencontres, des recherches pour trouver de nouvelles solutions. J’aime aussi la liberté d’exercer à mon compte. Je m’amuse beaucoup dans mon travail.
Sur quels projets travaillez-vous en ce moment par exemple ?
Je crée du mobilier pour un spectacle de cirque, Amor Amar, en Lozère. Je vais rencontrer l’équipe pour que nous validions ensemble les principes constructifs. Je réalise aussi le relevé d’un bâtiment pour un architecte, et j’ai un projet de rénovation pour un particulier. Je vais créer du mobilier pour une graphiste, et je poursuis ma collaboration avec le festival Détours du monde sur un projet de gradin.
Vos clients et employeurs sont très différents. Comment les trouvez-vous ?
Par mon réseau de connaissances, principalement, et en répondant à des appels d’offres, comme pour le projet d’exposition pour le Parc national des Cévennes, que j’ai réalisé cette année. C’est un projet dont je suis fière, car nous l’avons mené de A à Z avec ma collègue graphiste, de la conception à la réalisation. Nous avons géré tous les aspects artistiques, techniques et logistiques, et défendu nos choix. Ma formation d’architecte est ressortie : j’ai proposé une maquette du site pour valoriser le parc, je crois que c’est ce qui a retenu l’attention sur notre projet.
L’architecture et la scénographie ont en commun l’espace comme matière première. Quel lien voyez-vous entre les deux ?
Oui, toutes les deux questionnent l’espace et mêlent création et technique. Je pratique la scénographie comme je pratique l’architecture, ce sont les mêmes questions, les mêmes problématiques, à savoir l’espace, les déplacements, les besoins, la matérialité, la lumière…
Qu’est-ce que vos études d’architecte à l’INSA Strasbourg vous ont apporté ?
Elles m’ont appris à réfléchir le projet puisque, comme je le disais, ce sont les mêmes clés de compréhension. J’ai adoré la large palette des apprentissages, de la technique à la société, en passant par l’esthétique. C’est un domaine passionnant. Mes études d’architecte ont été une grande chance. Je me rends compte que mes compétences techniques comptent beaucoup. J’ai encore des liens très forts avec mes amis de promotion, ce sont de vraies rencontres et qui durent.
Quels sont vos projets, vos envies ?
J’ai envie de continuer à répondre à des appels d’offres pour des expositions, et donc d’avoir un atelier plus grand, d’investir dans du matériel, de développer mes moyens techniques. Beaucoup de choses me font envie, comme créer des décors pour le cinéma et faire de la charpente navale. Je viens d’ailleurs de passer un mois sur un chantier naval pour restaurer un vieux bateau en bois.
En savoir et en voir plus : annelaurebaudin.com